Un article très personnel qui témoigne des évènements que je vis ou ai pu vivre. J’ai longtemps réfléchi à la façon dont j’en parlerais ici car je ne trouvais pas assez de témoignages lorsque j’en avais besoin. J’espère que mes mots aideront les femmes qui sont déjà passées par là ou vivront ça un jour.
*Attention, alerte pavé*
Pour revenir sur cette histoire, il faut remonter à l’été dernier, quelques jours après mon 27ème anniversaire. Alors que nous venions d’apprendre ma toute première grossesse, celle-ci s’est arrêtée aussi rapidement qu’elle avait commencée. C’est ce que l’on appelle une fausse couche précoce.
Je souhaite relater les faits comme je les ai vécu car mettre enfin des mots sur ce moment douloureux m’aidera sans doute mieux à l’accepter. Ce blog est le reflet de ma vie, je l’ai démarré il y a bientôt 2 ans pour décrire et partager mes découvertes mais également laisser une trace des évènements marquants de ma vie.
Flashback – Été 2018
17/07/18
Tout juste après avoir démarré les essais bébé, j’ai découvert peu de temps après la bonne nouvelle, une chaude après-midi de juillet. Sur le coup, je dois dire que j’ai mis plusieurs secondes à réaliser que le test était positif, je trouvais même la barre trop discrète pour me réjouir immédiatement. Après avoir retourné la notice dans tous les sens, ça y est, je réalise : je suis enceinte ! Je tremble de partout mais aucune larme ne coule. Je retourne m’assoir en face de mon mari et cache ma tête derrière l’écran de mon ordinateur. 10 000 choses se passent dans ma tête, je n’arrive pas à y croire, c’est arrivé tellement vite que je n’ai pas eu le temps de préparer “l’annonce de mes rêves” moi, celle qui aime tout contrôler.
Évidemment je ne tiens pas en place et mes idées d’annonce au dessert le soir n’attendront pas. À peine une heure après, je lui tends mon test de grossesse mis dans une jolie boîte en même temps que je m’agrippe à son cou en pleurs.. Sans même avoir vu le test dans la boîte, il comprend. Nous sommes aux anges.
19/07/18
Nous nous envolons vers l’Italie, direction Bergame pour 2 jours riches en émotions où je retrouve mes meilleurs amis. Je n’ai pas eu le temps de faire une prise de sang pour confirmer à 100% ma grossesse. Néanmoins, je décide d’annoncer la bonne nouvelle à mes amis en face à face plutôt que d’attendre la confirmation puis devoir leur dire par Skype, à cause de la distance..
21/07/18
Nous rentrons en France après nos premiers mois d’installation à Lisbonne. Je rencontre pour la première fois ma petite nièce, née le 2 juillet. Ce moment particulier de retrouvailles en famille nous donne des ailes pour dévoiler notre secret à nos parents sans plus attendre.
22/07/18
C’est le jour de mon anniversaire ! Je savoure secrètement ce beau cadeau.
23/07/18
Pratiquement une semaine s’est écoulée depuis le test de grossesse sans que je n’ai eu le temps de faire la prise de sang. J’ai la sensation de “mentir” à tout le monde sur mon état, alors je file au labo à la première heure. Bizarrement, tout ce temps, je doutais car je n’avais aucun symptôme de grossesse. Il me tardait de recevoir les résultats afin d’être rassurée.
La prise de sang est faite à 9h mais les résultats tardent à arriver. En allant au toilette l’après-midi, je découvre de légères pertes marrons en m’essuyant. Je trouve ça étonnant mais le coup de fil de la secrétaire me confirmant mon début de grossesse 5 minutes après, me fait tout oublier.
24/07/18
Je ne me sens pas sereine. Nous nous réjouissons de la nouvelle, nous projetons mais au fond de moi, j’ai l’impression que quelque chose cloche.
J’ai toujours quelques pertes qui commencent à m’inquiéter alors je profite que ma soeur soit à la maison pour lui en parler. Après tout, elle vient juste d’accoucher, ça doit lui parler cette histoire !
Malheureusement pour moi, que ce soit à sa première grossesse ou celle qu’elle vient de vivre, elle n’a rien eu de similaire. Me voyant stressée, elle passe un coup de fil à sa sage-femme pour lui en parler. Celle-ci nous conseille d’aller faire un tour aux urgences à cause de mon groupe sanguin pas compatible avec celui de mon homme. Dans mon cas, et pour éviter tout risque de contamination ne sachant pas le groupe sanguin du bébé, je dois recevoir une dose de Rophylac.
Je me mets à pleurer lorsque j’entends le mot urgences, même si c’est à titre de prévention… J’ai l’impression que mon mauvais pressentiment se confirme. Nous nous y rendons alors en suivant et l’interne que je vois à ce moment là se veut rassurant. Il me parle des risques de fausse couche (fc) , m’indique qu’1 grossesse sur 4 se termine malheureusement comme cela mais ne se prononce pas pour moi. Je connaissais évidemment les risques liés à la fc mais on se dit toujours que c’est le genre de choses qui arrivent aux autres, pas à soi. Enfin du moins, on l’espère…
On me fait une rapide échographie sur le ventre mais à mon stade et avec leur appareil peu performant, on ne voit rien de particulier. Je repars une dose de Rophylac dans le bras plus tard et une ordonnance à la main pour contrôler mon taux de béta-hCG. Celui-ci étant censé doubler dans les prochaines 48 heures.
25/07/18
Je suis toujours au même stade, dans l’attente de savoir ce qui se passe. Je pars faire ma prise de sang de contrôle à la première heure. Les résultats tombent l’après-midi, mon taux à doublé ! Juste doublé, pas plus… Mes proches se veulent rassurant mais je continue de penser qu’il y a un soucis.
J’essaie d’être optimiste car mon homme en a besoin mais au fond de moi, je n’arrive plus à me réjouir. J’aimerais pouvoir faire une échographie endovaginale pour qu’on me dise clairement les choses mais mois d’été oblige, ma gynéco est en congés pendant 3 semaines. Je dois donc prendre mon mal en patience.
26/07/18
Les jours passent, lentement, je cherche des témoignages sur internet et m’effondre dès que je vois apparaître le mot fc. Les pertes brunes ont fait place à de légers saignements. Mon humeur est en dent de scie. Je culpabilise de penser au pire et les phrases “ne pense pas à ça, ça va porter malheur” ou “arrête d’y penser” n’arrangent pas les choses.
28/07/18
On fête mon anniversaire avec toute ma famille, évidemment nous ne pouvons pas profiter du moment pour faire d’annonce. Je n’arrête pas d’y penser et mon moral en prend un coup à chaque passage au toilette.
29/07/18
Ce coup-ci c’est l’anniversaire surprise de mon homme, toute sa famille s’est réunie pour ses 30 ans. Même sentiment que la veille au soir, malgré l’envie d’en parler aux proches qu’on ne voit pas souvent, mes saignements se sont accentués et je ne redoute plus qu’une chose..
30/07/18
C’est un lundi, la semaine reprend et je n’ai toujours pas la tête à travailler. Après le repas du midi je pars m’allonger car je ressens de violentes douleurs en bas du ventre. 20 minutes intenses de contractions. Une fois que celles-ci se sont calmées, je décide de retourner aux urgences. Cette attente devient interminable, je VEUX juste savoir ce qui se passe !
Cette fois-ci, je suis bien moins reçue qu’à ma première visite. L’urgentiste n’y va pas par 4 chemins. Mon mari n’ayant pas le droit de venir avec moi, c’est seule que j’entends “Ça m’a tout l’air d’une fc ce que vous me décrivez, de toute façon vous n’êtes pas la première et vous ne serez pas la dernière !”. Il repart aussi sec sans avoir fait d’examens complémentaires pouvant justifier ses propos violents. Je n’arrive pas à empêcher les larmes de couler, quand celui-ci fait une nouvelle apparition m’informant que la gynéco des urgences ne veut pas me voir (il est bientôt 17h, l’heure pour elle de rentrer chez elle…).
On repart, une nouvelle ordonnance à la main pour contrôler une fois de plus mon taux d’hormones de grossesse dans le sang. L’urgentiste précisant que celui-ci devrait bien avoir baissé avant de revenir à zéro. Encore une fois, sans m’avoir auscultée.
Ce con avait raison mais était-ce une raison pour me tenir ces propos ? Sans doute que oui… une fc précoce étant malheureusement si banale comparée à d’autres maladies/accidents auxquels il doit être confronté tous les jours…
Je ne décroche pas un mot au dîner, j’ai la gorge serrée. Je file prendre une douche chaude pour me relaxer et en me déshabillant, j’ai enfin la réponse aux questions qui ne m’ont jamais quittées. Cette fois-ci c’est bel et bien fini, il n’y a plus de doute possible. Je m’effondre dans la douche avant d’aller pleurer dans les bras de mon homme.
Quelques instants après et étonnement, je me sens soulagée. La colère de l’après-midi, puis la tristesse ont laissé la place au soulagement. Soulagée de savoir, ne plus attendre, ne plus douter, ne plus stresser. Tout cela va enfin s’arrêter.
31/07/18 – 10/08/18
Je saigne abondamment tous les jours. À présent je sais ce qu’il s’est passé et peux enfin mettre des mots dessus. Néanmoins c’est l’été, il fait chaud et devoir porter des serviettes hygiéniques est un supplice qui prolonge un peu plus ce cauchemar. Moi qui suis passée à la coupe menstruelle depuis un moment, ce retour en arrière me frustre d’autant que la piscine m’est interdite !
11/08/18 – 22/08/18
C’est les vacances ! Nous repartons au Portugal en famille, d’abord dans le nord avec mes parents et des amis puis, nous accueillons ma soeur et ses enfants chez nous. Les changements de décor et d’ambiance me permettent de penser à autre chose.
27/08/18
Retour de couche. Dans mon malheur, j’ai eu la chance que tout se soit évacué naturellement et que mon cycle ne ce soit pas perturbé. Tout va enfin pouvoir revenir à la normale. Pourtant, nous voilà de nouveau seuls chez nous et ce week-end là, j’y repense et m’effondre…
J’avais l’impression que la douleur s’était estompée mais au fond de moi, je commence à présent à ressentir de l’injustice.
Pourquoi ça m’est arrivé à moi ? Je suis jeune, ne fume pas, ne bois pas, suis en bonne condition physique… Je n’arrive toujours pas à comprendre. Ça me fait de la peine de voir mon homme malheureux, lui qui a été mis de côté dans tout ça. Dans ces moments-là, on prend seulement des nouvelles de la femme, sans s’inquiéter de savoir si sa moitié tient le coup. Lui aussi y croyait et est tombé de haut. Il est impuissant face à mes larmes et reste silencieux à mes côtés.
01/09/18
C’est la date officielle de conception de ma grossesse actuelle. Je ne le sais pas encore, mais pourtant, notre mois de noces de coton marquera le retour d’une bonne nouvelle !
Présent
Aujourd’hui, sur la fin de mon 5ème mois de grossesse, le temps ayant fait son travail, je n’oublie pas mais relativise cette expérience. C’est elle qui m’a enlevé l’insouciance et la gaieté du début de ma seconde grossesse et elle aussi qui m’a fait réaliser la chance que j’avais de porter à nouveau la vie. Je n’ai pas eu le temps la première fois de réaliser à quel point un miracle s’était vite produit, pas le temps d’apprécier cette nouvelle à sa juste valeur.
N’ayant personne autour de moi qui avait vécu la même chose pour en discuter, j’ai recherché beaucoup d’informations en ligne pour essayer de comprendre et me sentir moins seule. C’est à ce moment là que j’ai réalisé qu’il n’y avait pas plus de fc à notre époque qu’avant, si ce n’est qu’aujourd’hui, on apprend généralement notre grossesse beaucoup plus rapidement. Les fc précoces comme la mienne passaient plus inaperçues autrefois.
Durant ce “process” j’ai beaucoup lu et entendu la nature fait bien les choses. Certes, la nature trie les embryons et évacue ceux qui ne pourront pas évoluer correctement mais pour moi, une nature qui ferait bien les choses, sélectionnerait mieux du premier coup pour nous éviter de faux départ. Sans doute la complexité du corps humain.
En espérant que mon histoire redonnera espoir aux couples traversant cette expérience si banale et violente à la fois. Le fait que cela soit tabou continu d’alimenter la croyance que c’est un événement rare. J’en avais évidemment connaissance, sans pour autant avoir conscience qu’un quart des grossesses n’aboutissent pas. Ce chiffre est énorme !
Je m’en rends désormais de plus en plus compte car maintenant que j’en parle, d’autres femmes se livrent à moi sur le sujet. Je ne peux pas dire que cela soit rassurant mais cela aide tout de même à relativiser. C’est un moment difficile psychologiquement qu’il ne faut pas minimaliser, il ne faut pas en avoir honte ou se culpabiliser car on ne peut absolument rien n’y faire. Personne ne se prive pour parler de sa gastro ou de sa grippe alors je ne vois pas pourquoi on devrait garder cette douleur pour nous.
Notre société nous impose le délai de 3 mois avant de parler d’une grossesse à cause de ces risques mais être isolée dans ces moments là n’est pas la solution selon moi.
Je me doute que la douleur doit être la même peu importe la place d’une fc dans un projet de maternité, mais passer par là lors de sa toute première grossesse engendre des angoisses pour les suivantes et nous enlève une certaine part de légèreté liée à cette première fois. Je regrette aujourd’hui tout le stress vécu cet automne à cause de cet évènement mais ne peux revenir en arrière car cela fait parti de mon histoire.
Le bola que je porte en ce moment fait le lien entre cette grossesse et celle que je vis actuellement. Je l’ai reçu à Noël par ma maman qui m’a avouée l’avoir acheté cet été suite à notre annonce, sans avoir le temps de me l’offrir. Aujourd’hui, je sais qu’il n’était pas destiné au bébé dans mon ventre mais c’est pourtant son doux tintement qui vient l’apaiser.
Chaque histoire est différente et chaque femme ressentira cette perte à sa façon. En tout cas, je suis la preuve que des saignements peuvent être aussi bien signes de mauvaise nouvelle comme pas du tout mais ça, je l’aborderai lors du bilan de mon premier trimestre de grossesse !
Creamy Moka (Sofia) says
Bonjour Marine,
Nouvelle sur ton blog je me permet de faire un premier commentaire sur cet article qui me touche beaucoup. Aujourd’hui je suis l’heureuse maman d’un magnifique garçon de 7 mois, mais avant cela j’ai était maman deux fois. Une fausse couche précoce et un accouchement prématuré a 24 semaines, qui malheureusement ne c’est pas bien fini… Il est assez difficile d’en parler parfois, mais ça fait du bien. Sur mon blog d’ailleurs j’ai fait une lettre ouverte a mon fils parti beaucoup trop tôt… deux ans maintenant qu’il est parti. Ne garde pas tes angoisses, tes peurs et tes questionnements pour toi. Parle en, a ta famille, tes amies, et même parfois tu peux rencontrer d’autres personnes dans le même cas qui pourrons t’aider a mettre des mots sur ce que tu ressent.
Je te souhaite tout le bonheur du monde pour cette grossesse, ma dernière c’est très bien passé malgré ce qui c’est passé ces dernières années, pense a toi, a ton bébé, a la famille que tu es en train de construire. Pense au futur 🙂 Avance !
Creamy Moka (Sofia)
marine says
Merci Sofia pour ton témoignage !
Je n’imagine même pas la douleur d’une grossesse qui s’arrête et se termine mal à 24 semaines… (mon stade aujourd’hui même !..)
Je vais aller lire ta lettre ouverte de ce pas 😉
Profites bien de ta petite famille,
Marine
Un témoignage très touchant, j’espère que tu vis cette grossesse avec joie et sérénité. Je te souhaite tout le bonheur du monde 🙂
Merci ! 🙂 Oui je vis cette grossesse plus sereinement, surtout depuis le deuxième trimestre !
Merci pour ton témoignage. Je me sens moins seule dans ce qui je suis en train de vivre en te lisant.
Bon courage dans cette épreuve, ça fait du bien d’en parler et de ne pas le garder que pour soit !